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30 • MUSÉE DE GAJAC
Jean Suzanne
Ombre et lumière d’acier
À l’instar d’un silencieux Démiurge, Jean
Suzanne sculpte, depuis plus de trente ans,
tout un monde d’ombres, de lumière et
d’acier qui illustre la pureté des formes et la
dualité de l’univers.
Jean Suzanne est né en 1938 à Bois-Colombe. Enfant,
il est initié au monde de l’art et à l’univers de la
mécanique et de l’avionique par son père, ingénieur-
mécanicien chez Hispano-Suiza. Après des études
supérieures d’électronique à l’école Bréguet, il travaille
dans l’industrie comme ingénieur, tout en s’adonnant à
la pratique artistique. Venu s’installer dans le Quercy, il choisit la
voie de l’art en 1985, sculptant l’air et la terre à travers le bois, les
métaux, les alliages, mêlés aux résidus industriels.
Dans le recueillement quasi mystique de son atelier, au milieu de
ses carnets, de ses maquettes, Jean Suzanne, tel un Démiurge ou
quelque autre Vulcain, découpe, ploie, polit le métal pour donner
vie à la matière. Tout s’inscrit dans la durée, dans l’effort, voire
dans la douleur physique. On pourrait croire que de ce corps à
corps silencieux avec l’acier va naître l’image du chaos ou du champ
de bataille. Il n’en est rien. De ses moraines, failles, fractures,
mégalithes, se dégage un monde calme, apaisant, un sentiment
de plénitude d’un monde originel, géologique, fait de roches, de
minerais, de métal, de structures empruntant leurs formes aux
stalactites, aux falaises basaltiques, à l’amoncellement de granits.
Mais aussi d’un monde archéologique, fait de matériaux récupérés,
d’engrenages, de boîtes de vitesse, de pignons, de fragments d’une
civilisation qui a abandonné là ses rebuts.
À la croisée de ces domaines se construit une quête du sens
plastique, du rythme. Côte à côte, face à face, ces constructions
dialoguent, leurs peaux se réchauffent de tons taupe, châtaigne. La
lumière s’insinue, vibre, se réfléchit. Ombres et clarté s’y reflètent.
La simplification des volumes prédomine et dans la plus grande
retenue l’œuvre s’affirme, élégante et puissante. Jean Suzanne
aboutit là une création essentielle où, dans l’intimité de sa solitude,
chaque sculpture touche au dépouillement de la sagesse.
// JEAN SUZANNE La Brèche (1993), l’une des pièces significatives, a voyagé avec
Musée de Gajac son auteur jusqu’au Japon. Sélectionnée pour la biennale Fuji-
Du 26 mars au 12 juin sankei qu’organise le musée Hakone de Tokyo, elle vaut à Jean
Suzanne de remporter le prix Henry Moore cette année-là.
Tarifs : 3 e et 5 e La Brèche est pratiquée dans un mur de Berlin. Au-delà de la
Ouvert du mardi au dimanche démolition, elle symbolise l’ouverture sur un autre monde.
Musée de Gajac Photo : Jean Suzanne